E19 - Le traitement par exposition au soleil. Les méthodes SODIS et Solvatten

8 février 2012

1) De quoi s’agit’il ?

Du moyen le plus simple et le plus économique pour désinfecter l’eau en petites quantités en exposant au soleil des sacs ou des bouteilles d’eau transparentes en plastique.


Photo Sodis

2) Qui utilise surtout ce moyen et depuis quand ?

Dans l’antiquité, certaines personnes en Inde avaient déjà pris l’habitude de mieux orienter l’eau par rapport au soleil après avoir constaté qu’elle était de meilleure qualité, mais sans l’expliquer et sans le faire connaître.
L’idée en avait été reprise dans une publication de l’UNICEF en 1984, puis dans les années 1990 par des chercheurs de l’université américaine de Beyrouth et d’autres organismes, Canadien (CRDI) et Suisse (EAWAG, puis SODIS) pour réaliser de nombreux tests et expériences de laboratoire afin de comprendre précisément ce phénomène de désinfection de l’eau par irradiation solaire et surtout pour en mesurer et en prouver l’efficacité.

3) Pourquoi ?

Parce qu’il est extrêmement simple et pratiquement gratuit et qu’il peut être utilisé à n’importe quel endroit où il y a suffisamment de soleil, sans précaution importante. Certes il est aussi possible de faire bouillir l’eau, mais cela revient beaucoup plus cher, surtout en période d’augmentation sensible du coût de l’énergie et c’est moins écologique.

4) Qui est surtout concerné ? Lieux ou contextes dans lesquels ce moyen paraît le mieux adapté

Tout le monde peut utiliser ce procédé s’il se trouve dans une région ensoleillée et n’a besoin que de faibles quantités d’eau potable, mais il est plus particulièrement utile dans les pays où l’eau est rare et de qualité moyenne ou peu sûre et où les autres moyens de traitement sont inexistants ou insuffisants. C’est le cas de plusieurs villages, de certaines zones périurbaines ou régions isolées. Ce peut être enfin un premier moyen de secours pour des personnes ou des sauveteurs qui arrivent dans un lieu où ils ne savent pas encore si l’eau y est potable ou non.

5) En quoi consiste ce procédé ? Comment est-il mis en oeuvre ?

a) Le procédé

Celui-ci est le plus souvent connu sous le nom de SODIS (SOlar water DISinfection), département d’un Centre de recherche Suisse sur les eaux (EAWAG) qui l’a finalement mis au point et diffusé dans 20 pays en y organisant des actions de sensibilisation de la population à l’hygiène et à la santé où il est utilisé par environ 2 millions d’usagers.
En exposant des bouteilles d’eau transparentes en plastique en plein soleil pendant au moins 6 heures, l’effet combiné des rayons solaires ultraviolets UV-A et de l’élévation de température au-delà de 45° détruit les agents pathogènes (microbes, bactéries, parasites -Giardia et cryptosporidia- ou microorganismes susceptibles de provoquer des maladies et notamment de fortes diarrhées) et rend ainsi l’eau potable.

La lumière solaire est en effet composée de plusieurs éléments de longueurs d’onde différentes (le spectre), dont les rayons ultraviolets ( longueurs d’onde comprises entre 315 et 400 nanomètres) sont ceux qui sont les plus efficaces pour détruire les éléments pathogènes.
En pénétrant l’eau, les rayons ultraviolets réagissent sur l’oxygène dissout dans l’eau (d’où l’intérêt de secouer la bouteille avant de la remplir complètement afin de l’augmenter) et produisent des molécules très réactives d’oxygène à radicaux libres qui attaquent , inhibent ou détruisent les germes pathogènes. Ces radiations ainsi que la chaleur ambiante augmentent progressivement la température de l’eau, ce qui a un effet pasteurisant, accélère le processus et élimine déjà certains des éléments pathogènes incapables de résister à de hautes températures. Si celle-ci atteint ou dépasse 55°C, le temps de désinfection peut même être deux fois moindre.

Le plastique transparent de qualité PET –Polyéthylène téréphthalate, comme le plus souvent les bouteilles d’eau ou de soda) est le matériau qui laisse entrer le plus facilement les ultraviolets de la lumière et des rayons solaires. C’est pour cela et pour sa légèreté qu’il est préconisé.

b) La mise en œuvre


Photo Sodis

1) Il convient d’abord de se procurer des bouteilles en plastique, voire des sacs en plastique, PET.
(Il est recommandé de prévoir au moins 2 bouteilles d’1,5 litres par personne et par jour et d’en garder en réserve la même quantité pour le lendemain.)
2) Laver soigneusement les bouteilles s’il s’agit de leur première utilisation.
3) Remplir les bouteilles aux ¾
4) Secouer la bouteille pendant une vingtaine de secondes pour oxygéner l’eau.
5) Finir ensuite de remplir entièrement les bouteilles.
6) Exposer les bouteilles au soleil en les plaçant par exemple sur un toit ou sur tout autre support approprié ( un support réfléchissant ou recouvert par exemple d’un film de papier aluminium rend le procédé encore plus efficace et rapide).
7) Laisser les bouteilles au soleil du matin au soir et par précaution pendant au moins 6 heures. (même si la désinfection s’avère plus rapide avec un ensoleillement intense).
8) Attendre ensuite qu’elles refroidissent avant de consommer l’eau en toute sécurité.
 

6) Particularités du procédé - Limites - Précautions à prendre

a) Choix des bouteilles en plastique

Il ne faut pas utiliser en effet de bouteilles en verre (difficilement pénétrables par des rayons UV.
Il convient, pour plus d’efficacité, d’utiliser des bouteilles en plastique de 1 à 2 litres (3 l maxi) et d’un diamètre maxi de 10 cm. Il est préférable, mais non indispensable de choisir des bouteilles en plastique PET car elles sont les plus légères, les plus facilement pénétrables par les rayons UV et qu’on peut en trouver facilement presque partout. On peut aussi utiliser, bien que ce soit moins pratique, des pochettes en plastique transparent.
Les bouteilles doivent être incolores et transparentes. Les bouteilles en PET ont souvent un petit reflet bleuâtre mais ce n’est pas gênant.
Il est en outre vivement conseillé de conserver l’eau assainie (et de la servir) dans ces bouteilles pour éviter toute contamination et de ne les utiliser que pour cet usage. Si l’une des bouteilles est rayée ou devient en mauvais état, il convient de la changer.
Il est en outre conseillé de changer de toute façon les bouteilles au bout de 4 à 6 mois.

b) Qualité de l’eau à traiter : Non turbidité

Une eau trouble ne convient pas car la turbidité freine considérablement la pénétration des rayons ultraviolets. Si tel est le cas, il est nécessaire de filtrer l’eau au préalable, au minimum avec un tissu propre et fin. (Voir la fiche E17 « Les méthodes simples de traitement de l’eau à domicile »).
En pratique, il convient de filtrer l’eau dès que son degré de turbidité est supérieur à 30.
Sodis recommande un moyen simple d’estimer cette turbidité si l’on ne dispose pas d’un turbidimètre : Placer la bouteille PET remplie d’eau en position verticale sur un titre de journal et regarder à travers l’eau à partir de l’ouverture de la bouteille de haut en bas. Si les lettres du titre ne sont pas lisibles à travers l’eau, celle-ci doit être filtrée.

c) Cas d’absence de soleil, de Nuages ou de Pluie.

En cas d’absence de soleil ou de nuages pendant moins de la moitié de la journée, il est conseillé d’exposer l’eau plus longtemps pour qu’il y ait au moins 6 heures d’ensoleillement.
Si cette absence dure plus de la moitié de la journée, les bouteilles doivent être exposées une journée de plus. En cas de pluie même problème.
Remarque : on atteint là les limites du procédé et il est donc souhaitable d’avoir une réserve d’eau potable minimale, ou à défaut de faire bouillir l’eau ou encore de prévoir un système de récupération d’eau de pluie (voir la fiche E4 « La récupération de l’eau de pluie »)

d) Régions où le procédé est le plus efficace

Ce sont les régions bien ensoleillées situées entre les latitudes 15°N/S et 35°N/S.


Affiche d’information au Pérou

7) Principaux avantages et inconvénients

a) Avantages

- Simplicité de la mise en œuvre.

 Coût quasi nul. Aucun investissement nécessaire.

 Efficacité, fiabilité.

 SODIS affirme que 99 % des microorganismes responsables de la diarrhée ou du choléra sont détruits.

 Bonne adaptation pour traiter des petits volumes d’eau à boire. 

 Utilisation de ressources locales.

 Utilisation d’une source d’énergie renouvelable et gratuite.

b) Inconvénients

- Durée du traitement (6h mini).

 Inutilisable en cas de temps trop couvert.

 Nécessité d’avoir une eau claire (degré de turbidité inférieur à 30)

 Faible volume traité. Affiche d’information au Pérou

 Nécessité de refroidissement avant utilisation.

 Difficulté parfois de trouver des bouteilles PET en zone rurale.

8) Coût

Il est particulièrement faible et peut être évalué entre 1 et 3 € par famille et par an pour l’achat ou le remplacement de bouteilles (une bouteille peut coûter 4 centimes mais est le plus souvent récupérée), soit un prix de revient au litre inférieur à un demi-centime.
Il convient d’y ajouter, lorsqu’on entreprend, ce qui est recommandé, une campagne d’information avant de vulgariser ce procédé dans plusieurs villages ou toute une région, les frais d’organisation d’une campagne de sensibilisation à l’hygiène et à la santé (Voir Fiches C1 à C4 sur les diverses méthodes de sensibilisation) qui peuvent s’élever à un euro/personne.

9) Exemples de bonne pratique

Au Bénin seuls 41% des habitants en zone rurale ont actuellement accès à l’eau potable, ce qui oblige les autres à essayer de purifier l’eau, soit en la faisant bouillir, soit en la javellisant, soit en filtrant ses sédiments.
17% des décès de nourrissons sont provoqués par des diarrhées dues à de l’eau insalubre.
Le gouvernement cherche activement à se rapprocher des objectifs du millénaire et à porter notamment à 67 % d’ici 2015 le pourcentage des personnes disposant d’eau potable. Il multiplie à cet effet les initiatives.
L’une d’entre elles consiste, avec l’aide du CREPA (Centre Régional pour l’eau potable et l’assainissement à moindre coût à Ouagadougou), de SODIS et de la SONEB (Société Nationale des Eaux du Bénin), à lancer une vaste campagne d’information et de diffusion de la méthode SOLIS là où il n’y a pas encore d’eau potable.
Cette campagne a démarré depuis deux ans et remporte un franc succès en attendant de pouvoir prendre des mesures plus durables mais plus onéreuses. Le nombre de maladies, et notamment de diarrhées, a sensiblement baissé dans les nombreux villages concernés.
Des campagnes similaires ont été entreprises également récemment en Bolivie, au Népal et au Pakistan (1 500 000 personnes) avec le même succès.

10) Un procédé similaire mais plus coûteux : la méthode Solvatten


Container Solvatten

La méthode Solvatten a été mise au point par l’organisme suédois du même nom. C’est une adaptation astucieuse et pratique de la méthode SODIS dont elle n’est en fait qu’une variante demandant moins de manipulations et de précautions.

Elle consiste à utiliser un container de type jerrican en plastique spécial renforcé dont on ouvre les deux panneaux que l’on remplit chacun d’eau (qu’il est nécessaire néanmoins de filtrer ou de décanter au préalable si elle est très trouble), avant d’enclencher un bouton indicateur de fin de traitement et de l’exposer au soleil.
Au bout de deux à six heures, ceci dépendant des conditions météo, une pastille rouge de l’appareil tourne au vert, ce qui indique que le traitement est terminé. On peut alors laisser refroidir l’eau puis la consommer ou l’utiliser telle quelle, puisqu’elle est alors chaude, Container Solvatten
 pour faire cuire des aliments.

La méthode Solvatten combine une préfiltration sur tissu spécial microporeux et une désinfection par action des rayons UV et élévation de la température jusqu’à environ 55°. 
 
Son efficacité est très bonne et a été attestée par plusieurs organismes scientifiques
Cette méthode est déjà surtout utilisée au Népal, à Haïti, en Algérie et au Mexique et va se développer prochainement au Burkina Faso, en Ethiopie, au Kenya et au Chili.

a) Avantages

- Simplicité de la mise en œuvre.

 Méthode efficace et fiable. Utilisation commode et sécurisante pour des personnes en déplacement.

 Capacité de traitement supérieure à celle de Sodis (traitement de 10 à 20 l d’eau par jour).

b) Inconvénients

- Les bidons doivent être achetés et acheminés de Suède.

 Coût important pour des familles à faibles ressources (70 € en sortie d’usine par palettes de 72 unités)

 Eau non protégée contre les recontaminations si elle n’est pas bue assez rapidement.

 Durée de vie limitée à 5 ans.

11) Où s’adresser pour trouver davantage d’informations ?

a) Site internet

- SODIS : Documentation détaillée et illustrée de la Méthode de la société suisse SODIS :
http://www.sodis.ch/methode/index_FR

b) Vidéos

Le Portail de l’humanitaire propose diverses vidéos illustrant le principe et le mode d’utilisation de la méthode SODIS, notamment :

 une courte vidéo de 48" de la Fondation Sodis au Vietnam expliquant comment se réalise la méthode SODIS :

https://www.youtube.com/watch?v=UUBHVCaQ_bo

 - une vidéo de 1’10 par SAFE WATER en Haïti  « Solar water disinfection » expliquant comment fonctionne la méthode SODIS :

https://www.youtube.com/watch?v=k4OXxabZQQE

 - Courte vidéo sur le mode de fonctionnement du procédé SOLVATTEN disponible en ligne sur :
http://www.youtube.com/watch?v=ZaBy...



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